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jeudi 24 mars 2011

Les Caractères Distinctifs du Contrat de Socièté.

Intérêt de la Question.

         Il est important de connaître les caractères distinctifs du contrat de société pour pouvoir en présence de certains contrats, décider s'il y a société ou association, société ou contrat de travail avec participation aux bénéfices, société ou contrat de prêt avec participation aux bénéfices, etc, les règles applicables à ces différents contrats sont bien différentes.


Définition du contrat de société

L'article 1832 du Code civil définit ainsi le contrat de société : "La société est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes conviennent de mettre quelque chose en commun dans en vue de partager le bénéfice qui pourra en résulter." De cette définition, il résulte qu'il faut trois conditions pour qu'il y ait société : un contrat, des apports et la recherche de bénéfices à partager. On ajoute traditionnellement une condition : l'affectio  societatis, une volonté de collaboration.

I. - Le Contrat.

Il faut, à la base de la société, un contrat, c'est-à-dire un accord de volontés. Mais, il n'en faut pas déduire qu'il faut nécessairement un contrat écrit, ni même un accord explicite. Sans doute, une société par intérêts faite sans écrit, sera-t-elle nulle pour défaut de publicité. Mais la jurisprudence faisait produire effet à une société nulle, considérée comme société de fait et la loi du 24 juillet 1966 a généralisé une solution.

D'autre part, il est fréquent qu'un commerçant ayant fait l'objet d'un jugement de règlement judiciaire ou de liquidation des biens, le syndic assigne un autre commerçant pour le faire déclarer associé de fait et le faire soumettre à un écrit, mais le syndic établira que le second commerçant s'est conduit comme un associé : ici encore, il y a accord volontés, démontré par le comportement des deux intéressés.

Rôle variable du contrat.

La notion du contrat est très nette pour les sociétés par intérêts : il y a un contrat signé par tous les associés et ce contrat obéit à la règle générale qu'une convention ne peut être modifiée que par le consentement unanime des contractants (art. 1134 C. civ.), sous réserve de la possibilité d'une clause plus libérale en ce qui concerne les commanditaires.

En matière de sociétés par actions, la notion de contrat est moins nette. Ce n'est qu'au cas de constitution sans public à l'épargne que les futurs actionnaires signent les statuts ; au cas d'appel public à l'épargne. Il suffit qu'un seul fondateur signe les statuts. Et les statuts peuvent être modifiés par la volonté de la majorité, malgré les absents et les dissidents. On s'éloigne donc de la notion classique du contrat. Néanmoins, il y a bien un accord de volontés, des volontés concordantes pour fonder la société.

Les apports.

Diverses catégories d'apports.

Chaque associé doit faire  un apport. La réunion de ces apports constitue le fonds social, le capital social.
 C'est notamment parce qu'ils ne comportent pas d'apports que les groupement d'obligataires, de porteurs de parts ne constituent pas de sociétés : les obligations, les parts restent la propriété de chacun, ne sont pas "apportées".

On peut distinguer les apports :

1°  Suivant la nature des biens apportés.

On a : les apports en numéraire et les apports en nature, ces derniers comportant tous les apports autres qu'en espèces. La distinction est surtout intéressante dans les sociétés par actions et les sociétés à responsabilité limitée. Une variété d'apports en nature consiste dans les apports en industrie : ce sont des apports en travail, l'associé mettant son activité au service de la société : de tels apports sont rares. Ils ne sont admissibles, d'ailleurs, que dans les sociétés par intérêts, encore ne sont-ils pas possibles pour les commanditaires (loi du 24 juillet 1966, art 23, alinéa 2).

2°  Suivant la manière dont l'apport est fait.

On distingue : l'apport en propriété, qui est le mode normal, et l'apport en jouissance, qui est exceptionnel. Dans ce second cas l'apporteur conserve la propriété de l'apport, il conserve en conséquence, les risques, tandis qu'au premier cas les risques sont pour la société.

Apport d'un fonds de commerce.

Lorsqu'un fonds de commerce est apporté en société, la loi du 17 mars 1909 a pris des précautions pour garantir les intérêts des créanciers de l'apporteur, qui risque d'être privés d'une valeur très importante du patrimoine de leur débiteur.

L'article 7 de la loi du 17 mars 1909, qui régit cette matière, a été modifié par la loi du 11 mars 1949, par la loi du 26 juillet 1955 et par la loi n° 66-538 du 24 juillet 1966. Il faut également tenir compte du décret n° 67-238 du 23 mars 1967.

Tout apport de fonds de commerce en société doit être publié qu'il s'agisse d'un apport à une société en formation ou à une société déjà existante. Les formalités sont les mêmes que pour la vente d'un fonds (v n°s 146) ; deux insertions dans un journal d'annonces légales, une insertion au Bulletin officiel des annonces commerciales. Dans les insertions, l'élection de domicile est remplacée par l'indication du greffe du tribunal de commerce où les créanciers doivent faire leurs déclarations.

Dans le délai de dix jours de la dernière en date des insertions prévues par la loi, tout créancier de l'apporteur peut faire au greffe du tribunal de commerce une déclaration de créance.
A la suite de ces déclarations, les associés ou l'un d'eux peuvent former dans la quinzaine une action en annulation de la société (s'il s'agit d'une société en formation) ou de l'apport (s'il s'agit d'un fonds apporté, en augmentation de capital, à une société déjà existante). A défaut, la société est tenue solidairement du passif avec le débiteur principal.

Recherche des Bénéfices à Partager


Société et association

C'est la recherche de bénéfices qui permet de distinguer la société de l'association. La société a pour but de faire des bénéfices pour les partager entre ses membres. Le contrat d'association, au contraire, réunit deux ou plusieurs personnes "dans un but autre que de partager des bénéfices" (loi du 1er Juillet 1901 relative au contrat d'association, art 1er). La distinction est très importante, car les règles applicables soit aux sociétés, soit aux associations, sont très différentes, tant au point de vue du droit privé que du point de vue du droit fiscal.

Il existe cependant des groupements intermédiaires entre la société et l'association, prévus par une ordonnance du 23 septembre 1967, les "groupements d'Intérêt économique ", dont la réglementation est proche de celle des sociétés mais qui peuvent ne pas rechercher de bénéfices et se constituer sans capital. Ils sont immatriculés au règistre du commerce.

D'autre part, les sociétés constituées en vue de la construction ou l'acquisition d'immeubles en vue de les diviser par fractions attribuées aux associés, sont valablement constituées sous les différentes formes prévues par la loi, même si elles n'ont pour but de partager des bénéfices (art 5 de la loi du 16 juillet 1971).

La notion de bénéfices.

La cour de Cassation a adopté une notion restrictive des bénéfices. Elle a décidé, dans un arrêt célèbre des
Chambres réunies du 11 mars 1914, l'expression de bénéfices devait "s'entendre d'un gain pécuniaire ou d'un gain matériel qui ajouterait à la fortune des associés".
Pour qu'il y ait société, il ne suffit donc pas que les associés aient pour but de faire une économie ou d'éviter une perte, il faut qu'ils entendent augmenter leur fortune par la réalisation d'un gain.
C'est ainsi qu'un groupement qui a pour but de permettre à ses membres d'acquérir certaines denrées, certains objets à prix réduit est une association et non une société, malgré son but intéressé.


Participation aux bénéfices et aux pertes.

Tous les associés doivent participer aux bénéfices comme aussi contribuer aux pertes. Cela prohiber les conventions en vertu desquelles certains associés seulement profiteraient de tous les bénéfices ou seraient dispensés de contribuer aux pertes (art. 1855 C. civ.) : c'est l'interdiction des pactes léonins (c'est-à-dire des pactes par lesquels, comme dans la fable, certains prennent la part du lion) ; mais la nullité de la clause n'entraîne pas nullité d'une société par actions ou d'une société à responsabilité limitée : v. n°s 285 et 397.

Ainsi, chaque associé doit courir un risque. En dehors de l'interdiction précédente, les parties sont libres de fixer la mesure dans laquelle chacune d'elles participera aux bénéfices ou contribuera aux pertes. Notamment, elles sont libres de convenir que des associés ne seront tenus des dettes que jusqu'à concurrence de leurs apports : telle est la situation des commanditaires, des actionnaires, des membres des sociétés à responsabilité limitée.

Volonté de Collaboration


Collaboration active et égalitaire.

Dans la plupart des contrats, les contractants ont des intérêts opposés, ce sont des adversaires. Dans le contrat de société, ils ont, au contraire, des intérêts communs. Il faut donc, pour qu'il ait réellement contrat de société, que les contractants aient cet état d'esprit spécial, cette volonté de collaboration qu'exprime la vieille formule affectio societatis (que l'on peut traduire par esprit sociétaire). Et cette collaboration doit avoir lieu un pied d'égalité, égalité qui sera plus ou moins complète suivant le rôle de chaque associé dans la société, mais qui se manifestera au moins par un certains droit de contrôle.

C'est ce caractère qui distingue la société d'autres contrat tel que le contrat de travail avec participation aux bénéfices, dans lequel l'employé conserve une situation subordonnée, tel que le prêt avec participation aux bénéfices dans lequel le prêteur reste un créancier étranger à la gestion de l'affaire.